« Avec Mediapart, on a essayé de ne pas mettre notre énergie exactement au même endroit afin d'avancer plus vite »

Dans son interview à Rembobine, il revient sur la mobilisation de la rédaction dans le contexte des législatives anticipées, l'importance d'unir ses forces avec d'autres médias, et la distinction entre journalisme et militantisme.

Bonjour Mathieu. Dans le contexte des législatives anticipées, comment vous est venue l'idée de vérifier les profils des candidat·es investi·es par le RN ?

Couvrir l'extrême-droite d'un point de vue critique est au cœur de l'identité de StreetPress. Lorsque la dissolution de l'Assemblée a été annoncée par Macron, il nous est donc apparu évident de concentrer nos efforts sur le sujet car à ce moment-là, le risque que Bardella se retrouve à Matignon était réel. On voulait agir avec nos armes, celles du journalisme d'enquête.

Quand les premiers noms des candidat·es investi·es par le RN ont commencé à tomber, on a donc commencé à se les répartir au sein de la rédaction pour chercher à savoir qui ils étaient vraiment. Pour ce faire, nous avons eu différentes approches. Il y a certain·es candidat·es pour lesquel·les nous avions de bonnes raisons de nous y intéresser. Pour d'autres, ce sont des sources comme nos lecteur·trices qui nous ont fait remonter des infos. Une partie non négligeable de nos infos provient de nos lecteurs ou de militants qui se disent qu'on fait bien notre boulot, et que ça a du sens de nous faire remonter des infos.

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D'autres médias, comme Libération et Mediapart, ont également fait un gros travail de vérification des profils des candidat·es RN. Avez-vous travaillé main dans la main ?

Avec Libération et Mediapart, on est effectivement les trois médias à avoir fait le plus gros boulot sur le passif des candidat·es RN. La Presse quotidienne régionale (PQR) ainsi que quelques autres médias ont également sorti quelques infos par-ci, par-là. Avec les équipes de Libération et de Mediapart, on se connaît, c'est un petit monde. On est donc resté en contact pendant toute la période électorale. Avec Mediapart par exemple, on a essayé de ne pas mettre notre énergie exactement au même endroit, afin d'avancer plus vite sur la vérification des profils.

Quels ont été les avantages à travailler à plusieurs médias sur le sujet ?

Grouper nos forces a certainement permis d'avancer plus vite, là où on peut s'étonner que certains autres gros médias nationaux n'aient pas fait ce travail... Quoi qu'il en soit, on peut se féliciter du résultat, car le profil des candidat·es RN a été un des principaux sujets de discussion dans les médias lors de la dernière semaine avant le second tour ! Ce travail d'enquête a certainement joué dans la balance, aux côtés de deux autres facteurs clés : la mobilisation citoyenne sans précédent, ainsi que les accords de désistement mutuel. Sans ces accords, le RN aurait certainement gagné.

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Chez StreetPress, comment faites-vous la différence entre journalisme et militantisme ?

Nous ne sommes pas militants, au sens où nous ne travaillons pas pour un quelconque parti, mais nous sommes un média engagé, qui assumons notre point de vue et nos valeurs. Les Echos, par exemple, sont aussi un média engagé, mais pour la retraite à 70 ans. Ils le répètent à longueur de journée sans qu'on ne leur dise jamais rien... Nous avons un engagement fort, nous le disons peut-être juste un peu plus que les autres.

De nouvelles échéances approchent à grands pas, avec les municipales en 2026 et les présidentielles en 2027. Comment vous y préparez-vous ?

Nous allons bien sûr nous mobiliser. Avec d'autres médias indépendants, on prépare un gros projet pour les municipales, qu'on va annoncer à la rentrée, mais pour le moment, on ne peut pas en dire plus.